Jean-Yves Gilet, 54 ans, ex-directeur général de la branche Inox d’ArcelorMittal, reprend les rênes du FSI. Il devra prouver que les 20 milliards du fonds souverain peuvent avoir un effet de levier sur le dynamisme de l’économie française.

Dix ans au ministère de l’Industrie, vingt ans dans une entreprise industrielle. Avec ce cocktail un tiers public, deux tiers privé, Jean-Yves Gilet a le bon pedigree pour diriger cet intervenant mi-carpe, mi-lapin qu’est le Fonds stratégique d’investissement (FSI). Il lui fallait rassurer ses deux actionnaires : la Caisse des Dépôts, qui veut poursuivre sa stratégie d’investisseur avisé en évitant d’aller à la rescousse de tous les canards boiteux et le gouvernement, décidé à faire briller sa stratégie industrielle quitte à faire des choix plus audacieux. Du même âge que son prédécesseur, Gilles Michel, et issu comme lui des rangs de Polytechnique, Jean-Yves Gilet n’est pas seulement un industriel pur jus mais un initié de l’appareil de l’Etat et des arcanes de la politique.

Il fait ses premiers pas en 1981 dans une direction départementale de l’industrie avant de rejoindre l’administration centrale comme chef du service des interventions industrielles puis directeur de cabinet du ministre de l’Aménagement du territoire, Jacques Chérèque (le père du syndicaliste actuel). Une expérience utile pour tenir son rôle au moment où le gouvernement a renforcé les prérogatives de l’homme qui représente l’Etat au conseil d’administration du FSI : Jean-Dominique Comolli. Ce dernier est désormais directement rattaché à la ministre de l’Economie et des Finances, Christine Lagarde.

BAROUDEUR. Issu d’une multinationale indo-européenne, Jean-Yves Gilet connaît les opportunités et les menaces des entreprises françaises plongées dans le grand bain de la mondialisation.

La situation n’a pas de quoi inquiéter outre mesure Jean-Yves Gilet car, s’il vit le FSI comme un instrument dont il est prêt à défendre l’indépendance, il ne lui déplaît sans doute pas de le mettre plus clairement au service d’une stratégie nationale. Son ami Jean-Luc Fallou, le président de la société de conseil Stratorg, le décrit comme un homme « attaché au développement de son pays et en quête perpétuelle de sens ». L’homme clé de Mittal pour relancer la branche Inox déficitaire, qu’il a fait grimper à plus d’un milliard de dollars d’Ebitda juste avant la crise, ne se retrouvait sans doute plus vraiment dans les valeurs du nouveau groupe. Une belle courbe de Bourse ne suffit pas à combler ses aspirations. En témoignent ses multiples engagements : président du Conseil de l’école des Mines d’Albi, président du comité « responsabilité sociétale des entreprises » du Medef, vice-président des « Entreprises pour l’environnement ». Cette fibre ne peut que séduire les partenaires sociaux du conseil d’orientation du FSI qui poussent pour que l’intérêt général soit clairement mis au coeur des arbitrages du Fonds.

Seul bémol à son profil, il est dans le même chaudron, l’Inox, depuis vingt ans. Il lui faudra s’appuyer sur les équipes du FSI pour déceler des pépites dans la diversité des secteurs qui viendront frapper à sa porte. Participant assidu du club Raphaël qui prône le « management par la confiance », Jean-Yves Gilet aura là une belle occasion de mettre en pratique ce concept.